SAULNIER
Démarche artistique / Artist Statement
L'art est ce qui m'engage le plus intensément dans ce monde. Ma pratique, essentiellement autobiographique, se centre sur une exploration de la mémoire, des émotions et des relations humaines. À quelle vitesse puis-je transformer les matériaux de mon quotidien en art avant qu'ils ne me submergent physiquement et émotionnellement ? C'est un équilibre difficile à maintenir et je me retrouve souvent près de déborder. Cet état témoigne davantage de l'immense énergie qui m’habite et me pousse à créer, qu'à ce qui peut être considéré, du dehors, comme des actes radicaux d’expression artistique. L'art me détourne de l'angoisse et du désespoir.
Ma mémoire est la force la plus vitale et la plus puissante de ma pratique. Cela vient du fait qu’ayant été séparée avant l'âge de deux ans de mon pays natal (la Guinée Conakry) et de mes parents biologiques, j'aie dû recréer un récit de mes origines avec les matériaux que je possédais, inventant et improvisant dans le processus. De cette matrice est né le besoin d'enregistrer les événements même les plus triviaux de mon existence et de fixer les gens que j'aimais sur un support qui les empêcherait de disparaître soudainement.
Je perçois l'art comme une manière de réécrire la vie avec un sens et des codes qui me sont propres : c'est ma résilience particulière et ma résistance à l'adversité.
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Art is what most intensely engages me with this world. My present limits lie less in my imagination than in the means to materialize whatever comes through my mind. Ten years ago, when I created twenty-meter narrative embroideries of intimate, erotic and sexual relationships (Rainbow Blues 2007-2008, Intimate Ballad 2008-2010), these limits seemed almost not to exist. I have tried to maintain this hallucinatory spirit of amplified possibility through an ongoing installation entitled Wall and Discards (2006-2018). This piece comprises of more than a thousand drawings accumulated over the years, orchestrated and displayed dialectically on the wall and floor.
The creation of memory is my practice’s most vital and empowering force. This obsession comes from the fact that, having been separated from my native country (Guinea), biological mother and father (dead) before the age of two, I have had to recreate a narrative of my origins with the materials that I possessed, inventing and improvising in the process. From this matrix of memory recreated has grown the need to record even the most trivial events of my daily life and to fix the people that I loved on grounds that would keep them from suddenly disappearing.
I see art as a way of reinscribing life with a sense and codes of my own: this is my particular resilience and my resistance to adversity.